Au cours des dernières décennies, la gestion des finances publiques a subi, dans les pays développés, une véritable révolution. Le budget-programme a remplacé le budget de moyens qui avait été pendant des siècles1 l’outil de gestion financière par excellence. L’emphase a été mise sur les services livrés aux citoyens et la performance de l’administration est appréciée par rapport à l’atteinte des objectifs fixés.

Les assises du nouveau paradigme posées, le modèle a évolué progressivement, redéfinissant aussi les attentes en matière de reddition des comptes. Ainsi, on est passé des analyses d’efficacité (extrants, effets et impacts) et d’économie à celle d’efficience. Par exemple, en Grande-Bretagne, c’est l’Audit Commission2 qui pour les services publics locaux, est chargée de contrôler les trois E (Efficacité, Économie, Efficience) sous-jacents au principe « Value for Money » (VfM).

Plus récemment, encore, on a pu constater une évolution du concept de VfM. Le vieillissement de la population entraîne une augmentation des coûts des services rendus alors que la base fiscale se rétrécit. Il semblerait alors logique que la VfM soit envisagée sous sa seule dimension « Faire plus avec moins »; mais cela paraît insuffisant.

En effet, il est loin d’être évident que les réductions potentielles de coûts (y compris celles induites par l’introduction de nouvelles technologies) pourront permettre de financer les nouveaux besoins. De là à imaginer que l’on doive « Faire autrement avec moins » il n’y a qu’un pas. « Faire autrement avec moins », cela signifie allouer les budgets aux objectifs et non aux activités qui sont censées permettre de les atteindre. Problème de sémantique? Pas uniquement. Une telle démarche suppose 1) l’existence d’un projet social partagé; 2) une hiérarchisation quantifiable des enjeux sociaux; 3) l’allocation des ressources en fonction de l’importance de ces enjeux et 4) le passage au crible de tous les services pour ne retenir que ceux qui y concourent de manière efficiente. Dans le même sens, le Centre for Social Justice britannique, dans sa réponse à la revue du cadre de dépense 2010 notait :

« There needs to be a clear recognition that the government’s priorities should be about the societal outcomes it hopes to achieve and not the services it provides: what matters ultimately is the level of crime and people’s feelings of safety, for example, rather than the number of police or arrests.3»

L’exercice semble difficile, mais la crise financière et budgétaire actuelle va peut-être forcer tout le monde à penser autrement.

Vous pouvez télécharger le document complet à l’adresse suivante : La reddition des comptes (http://spid.com/acrobat/reddition_comptes.pdf)

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1. Même si on peut faire remonter l’existence de documents budgétaires à l’Antiquité, qu’il suffise de mentionner qu’il existait déjà en France au XIVe siècle un État général des finances qui recensait les dépenses et recettes prévues pour l’année.

2. http://www.audit-commission.gov.uk/Pages/default.aspx

3. The Centre for Social Justice (July 2010). Response to the Spending Review Framework 2010: Maximising Social Value. Page 11. www.centerforsocialjustice.org.uk.

 
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